La cession d’éléments d’exploitation agricole

Qu’est-il possible de céder dans une exploitation agricole ?

L’article L. 411 – 74 du code rural et de la pêche maritime punit la cession de valeurs non justifiées et la surévaluation de biens mobiliers.

Les pratiques qui consistent à monnayer, directement ou indirectement, le bail à l’occasion d’un changement d’exploitant sont répréhensibles.

On peut, par conséquent, se poser la question suivante : tous les éléments incorporels d’une exploitation agricole sont-ils incessibles ?

Les avancées récentes :

Deux arrêts de jurisprudence de la Cour de cassation apportent des réponses à cette question

Le premier qui date du 16 septembre 2009 nous indique que « le droit de présentation d’une clientèle professionnelle autre que commerciale et une clause de non-concurrence sont des droits cessibles. Par ailleurs une marque est un bien incorporel qui a une valeur patrimoniale. » Dès lors, ces biens sont cessibles et ne peuvent pas être condamnés au titre de l’article L411-74 du code rural et de la pêche maritime (CRPM).

Le second arrêt est plus récent. Il date du 6 octobre 2016. Dans cette décision, la Cour de cassation nous indique que « les méthodes de culture, procédés et savoir-faire, à supposer qu’ils soient propres au cédant et que leur connaissance ne soit pas directement accessibles au public » sont cessibles.

Dès lors, les fermiers peuvent envisager de céder certains éléments incorporels.

Les experts peuvent évaluer les éléments incorporels cessibles. L’évaluation par un expert qui respectera les conditions fixées par la Cour de cassation sont, par ailleurs, une garantie qu’il n’y a pas surévaluation de ces éléments incorporels.

Qu’en est-il des autres éléments dont la cession peut être envisagée :

Les droits à production de base (DPB) :

Ils sont la propriété des exploitants et sont cessibles. Les experts ont mis en place une méthodologie pour la cession de ses droits. Cette méthodologie tient compte de leur valeur économique et permet une transaction équitable entre cédant et preneur.

Les biens mobiliers :

L’appel à un expert est particulièrement indiqué pour évaluer, sans surestimation, les biens mobiliers cédés. Sa signature est une garantie à ce sujet.

Les améliorations du fonds :

Il figure au bilan de nombreuses exploitations un poste « améliorations du fonds ». L’article L411-69 du CRPM prévoit un droit à indemnité pour « les améliorations du fonds » apportées. Cette indemnité n’est due que par le bailleur, à la fin du bail. La possibilité d’une cession directe entre fermier sortant et fermier entrant n’est pas possible, sauf dans le cas d’une cession de bail effectuée en application de l’article L. 411-35 ou de l’article L. 411-38 du CRPM.

L’expert peut évaluer les améliorations du fonds. Cette évaluation respectera les règles prévues par le statut du fermage. L’évaluation ne signifie pas que la cession est réalisable.

L’existence des améliorations du fonds (et notamment culturales) ne peut être prouvée que s’il est possible de faire une comparaison entre l’état à l’entrée dans les lieux et l’état à la sortie.

Mais cette comparaison ne résulte pas obligatoirement de l’existence d’un état des lieux d’entrée. Tous les moyens de preuve sont admis pour établir la comparaison entre l’entrée et la sortie.

Qu’en est-il en cas de bail cessible ?

L’expert est en mesure d’évaluer le fonds cultural qui inclura la valeur de tous les biens incorporels.

En cas de bail cessible, le fonds cultural est cessible sans risque.

En conclusion :

Le rapport d’expertise est donc tout à fait utile quand un exploitant veut céder sans risque. Mais il ne faut pas demander à l’expert de faire figurer dans son rapport des biens surévalués ou de garantir la cessibilité des biens qui ne le sont pas.

Thierry Nansot (http://www.expertagricolenord.fr/index.php )